Le système de prévoyance en Suisse repose sur le principe des 3 piliers qui combine prévoyance étatique, professionnelle et privée.
Chaque pilier poursuit des objectifs différents :
- 1er pilier, la prévoyance publique : couvrir le minimum vital une fois à la retraite
- 2ème pilier, la prévoyance professionnelle (LPP) : conserver, avec le 1er pilier, dans une large mesure, le niveau de vie antérieur.
- 3ème pilier, la prévoyance individuelle facultative : assurer les besoins complémentaires
Dans la vision du législateur, au moment de la retraite, le cumul des rentes du 1er et 2ème pilier devraient permettre aux assurés d’atteindre environ le 60 % du dernier salaire. Or, selon les dernières études, ce cumul ne représenterait plus que 46 % du dernier salaire en 2025 contre 57 % en 2010. Les hauts revenus connaîtraient une diminution encore plus conséquente, le rapport devrait être de 51% à 37%.
Dans cette perspective, le 3ème pilier devient un levier incontournable pour compléter ses revenus et combler ses lacunes de prévoyance.
Le 3ème pilier peut être un produit bancaire ou d’assurance, lié (3A) ou libre (3B).
Pilier 3A : l’investissement doit respecter certaines conditions et limites mais présente des avantages fiscaux importants en contrepartie.
Le contrat peut être souscrit auprès d’une compagnie d’assurance (police d’assurance associant épargne et prévoyance) ou d’une banque (compte de prévoyance auprès d’une fondation bancaire). Dans les 2 cas, les produits sont soumis aux mêmes conditions légales, définies par l’Ordonnance OPP3.
Tableau comparatif : 3A Assurance vs 3A Bancaire
Conditions et limites pour la souscription d’un pilier 3A :
- Eligibilité à la souscription : uniquement les personnes soumises à l’AVS (salariés ou indépendants).
- Montant maximum de versement par an, fixé par la Loi. Pour 2021 :
- Personne affiliée au 2ème pilier : 6 883 CHF
- Personne non affiliée au 2ème pilier (par ex. les indépendants) : 20% des revenus déterminants, mais maximum 34 416 CHF
- Retrait de l’avoir possible à partir de 5 ans avant la retraite mais, dans certains cas, il peut être anticipé : départ définitif de la Suisse, achat de la résidence principale ou amortissement de l’hypothèque de la résidence principale, rachat d’années de cotisation dans une caisse de pension (2ème pilier), début d’une activité lucrative indépendante .
- Le preneur d’assurance, la personne assurée et le payeur de prime sont une seule et même personne.
- Bénéficiaires définis par la loi en cas de décès : la prévoyance liée ne permet pas de choisir librement les bénéficiaires du capital. La clause bénéficiaire prévoit l’ordre suivant :
-
- le conjoint survivant ou le partenaire enregistré survivant,
- les descendants directs et les personnes physiques à l’entretien desquelles le défunt subvenait de façon substantielle, ou la personne qui avait formé avec lui une communauté de vie ininterrompue d’au moins cinq ans immédiatement avant le décès ou qui doit subvenir à l’entretien d’un ou de plusieurs enfants communs,
- les parents,
- les frères et sœurs,
- les autres héritiers,
Pilier 3B : la prévoyance libre, qui peut être souscrite sous la forme de police d’assurance (1) ou compte bancaire, permet plus de liberté mais peu ou pas d’avantages fiscaux, selon les cantons.
Conditions et limites pour la souscription d’un pilier 3B
- Eligibilité à la souscription : investissement ouvert à tout résident Suisse.
- Versement libre.
- Durée du contrat décidée par l’assuré et retrait libre des fonds (en respectant un délai minimum de 3 ans de contrat).
- Preneur d’assurance, personne assurée et payeur de prime peuvent être des personnes différentes.
- Clause bénéficiaire : totalement libre.
Tableau comparatif : 3A (prévoyance liée) vs 3B (prévoyance non liée)
Fiscalité du 3ème pilier
Pilier 3A
- Chaque année :
- Déduction fiscale des versements effectués, dans la limite du montant autorisé par la Loi. Selon le taux d’imposition, cela signifie qu’entre 20 et 40 % de l’investissement est récupéré immédiatement sous forme d’économie d’impôt lors de la déclaration des revenus.
- Exonération de la fortune imposable : l’avoir du pilier 3A ne rentre pas dans la fortune imposable. Par conséquent, aucun impôt sur la fortune n’est dû. Les rendements des intérêts ne sont pas non plus soumis à l’impôt sur le revenu et à l’impôt anticipé.
- Au moment du retrait des avoirs (le retrait partiel n’est pas admis), le capital est imposé séparément des autres revenus à un taux réduit à la hauteur de :
- Confédération : 1/5 du taux normal.
- Canton de Vaud : 1/3 du taux normal. En 2022, l’imposition devrait baisser à 1/5 du taux normal.
- Communal : selon le taux d’imposition propre à chaque Commune.
La possibilité de souscrire différents piliers 3A permet de :
-
- Diversifier le risque d’investissement.
- Réduire l’impact de la progressivité de l’imposition (et, donc, la charge fiscale) en échelonnant les retraits dans les 5 ans qui précèdent la retraite.
Différents sites internet proposent la possibilité de calculer en ligne les avantages fiscaux liés à la souscription d’un compte 3A (2).
- En cas de décès :
- Impôt sur les revenus :
- Le versement sous forme de capital est imposé séparément des autres revenus à un taux réduit, qui dépend du canton de résidence et du montant du versement. Le montant de l’impôt est indépendant du degré de parenté entre bénéficiaire et défunt.
- Les versements sous forme de rente sont imposables à 100% avec les autres revenus.
- Impôt sur les revenus :
-
- Impôt de succession : les prestations de la prévoyance individuelle liée sont toujours exonérées de l’impôt sur les successions.
Pilier 3B
- Chaque année :
- Non déductibilité fiscale des versements effectués : les montants entrent dans le cadre des déductions à forfait pour primes d’assurance. Compte tenu du faible forfait reconnu (qui inclut les primes de caisse maladie et certaines assurances accidents), aucune déduction du revenu imposable n’est, infine, possible. Seuls les Cantons de Fribourg et Genève autorisent une déduction significative.
- Imposition sur la fortune : la valeur de rachat est imposable annuellement comme un élément de fortune.
- Au moment du retrait de l’avoir (3) :
- Si effectué sous forme de capital, il est exonéré d’impôt.
- Si converti en rente viagère (4), en principe, 40% de la prestation est imposable à un taux réduit.
- En cas de décès :
- Imposition sur le revenu : elle dépend du canton de résidence, du montant et du type d’investissement effectué. Notamment, en cas de :
- Assurance « risque pur » : compte tenu qu’il n’y a pas de constitution de capital mais uniquement financement d’une assurance décès, l’avoir est imposé à un taux réduit si perçu sous forme de capital.
- Assurance « mixte » : l’avoir est exonéré d’impôt sur les revenus (5).
- Imposition sur le revenu : elle dépend du canton de résidence, du montant et du type d’investissement effectué. Notamment, en cas de :
-
- Impôt sur les successions :
- Les assurances « risque pur » sont toujours exonérées de l’impôt sur les successions.
- Les assurances « mixtes » sont soumises à l’impôt sur les successions dans leur totalité.
- « Rente viagère » : 60% de la prestation (voir ci-dessus pour le traitement du 40% soumis à l’impôt sur le revenu) est soumis à l’impôt sur les successions.
- Impôt sur les successions :
Tableau comparatif de la fiscalité du 3ème pilier
Conclusion :
Lors du choix du produit d’investissement, différents paramètres doivent être pris en considération et analysés selon la situation personnelle et professionnelle et les objectifs de chacun. Trois aspects doivent être soulignés :
- La prévoyance facultative joue un rôle de plus en plus important pour répondre aux besoins qui ne seront pas couverts par le 1er et 2ème pilier.
- Les avantages fiscaux de la prévoyance liée (3A) sont soumis à des conditions plus strictes limitant les montants des versements et des retraits ainsi que le champ des bénéficiaires. La liberté reconnue à la prévoyance libre (3B) ne bénéficie pas, en revanche, d’avantages fiscaux mais permet de favoriser certains bénéficiaires (mais attention aux impacts en termes d’imposition fiscale !)
- La possibilité accordée par la Loi de retirer les avoirs de différents piliers 3A de manière échelonnée, à partir de 5 ans avant la retraite, permet d’atténuer l’impact de la progressivité fiscale d’un retrait global, effectué au moment du départ à la retraite.
Lors de nos cycles de conférences, le thème du 3ème pilier au sein de la planification de la retraite est traité de manière approfondie par notre expert M. Xavier Grandjean.
Pour plus d’informations sur nos cours : www.arpr.ch
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Toutes modifications de la législation en vigueur à ce jour demeure réservé.
Notes :
[1] Cela permet d’ajouter à l’épargne aussi la couverture des risques décès et invalidité.
[2] Par ex. Migros : https://www.migrosbank.ch/fr/personne-privee/prevoyance/calculateur/calculateur-de-prevoyance.html?.
[3] Des conditions spécifiques sont prévues pour les assurances à prime unique.
[4] La fiscalité des rentes est différente selon le bénéficiaire des prestations : preneur ou tiers.
[5] Selon le type d’investissement, une durée minimale de contrat peut être requise.